La sédentarité nuit gravement à la santé et donc plus ou moins directement à l’économie. Afin d’aider les gens à se sentir mieux dans leur tête et dans leur corps, Tanguy de La Villegeorges a cofondé WeWard, une application qui récompense ses utilisateurs lorsqu’ils marchent.

Qu’est-ce qui a présidé à la création de WeWard ?

Tanguy de La Villegeorges. Mes deux associés, Yves Benchimol, Nicolas Hardy et moi-même étions des ingénieurs qui travaillions ensemble et faisions le constat que nous passions toute notre journée devant un ordinateur, qu’au déjeuner nous commandions UberEats ou Deliveroo et que le soir nous prenions un Uber pour sortir. Avec WeWard nous récompensons depuis quatre ans les gens qui marchent. Tout le monde a deux jambes, un téléphone, et la marche est la vitesse naturelle de l’homme.

Quel est votre modèle économique ?

Au début, nous n’étions pas viables car nous donnions de l’argent à des gens sans en gagner nous-mêmes. Il nous fallait atteindre un certain nombre d’usagers pour monétiser notre produit. Aujourd’hui nous comptons 20 millions d’utilisateurs et un Français sur cinq a téléchargé WeWard. Nous nouons des partenariats avec des marques pour financer les Wards que nous distribuons. Celles-ci peuvent être référencées sur notre application, les utilisateurs gagnent des Wards quand ils achètent des produits en passant par nous. Les marques peuvent également mettre en place des championnats. Par exemple : "Marchez tant de temps en écoutant Deezer". L’autre partie de ce que nous gagnons nous permet de développer l’entreprise.

Combien touchent vos utilisateurs ?

Ils gagnent en moyenne 20 euros tous les six mois. En tout, nous leur avons distribué 10 millions d’euros et nous avons versé un million d’euros à des associations via les dons des utilisateurs.

"Nous voulons fournir aux entreprises un environnement qui fait marcher davantage les salariés"

Les utilisateurs de WeWard marchent-ils plus que les autres ?

Nous avons fait appel à un cabinet extérieur pour mesurer notre impact. Résultat : 25 % de temps de marche en plus par rapport aux habitudes antérieures des utilisateurs et 600 000 tonnes de CO2 par an économisées. La gamification permet aux gens d’atteindre différents niveaux et de se dépasser. En moyenne, les Français marchent 7000 pas par jour. En Espagne, c’est plutôt 7500, aux États-Unis – où nous sommes en train de nous implanter – la moyenne est de 5000 pas. Nous devons prouver à chacun, notamment grâce à des challenges adaptés à chaque pays, qu’il est possible de marcher chaque jour davantage et d’atteindre régulièrement les 10000 pas recommandés par l’OMS.

Certaines personnes sont plus motivées par les challenges, d’autres par l’aspect écologique ou pécuniaire de la démarche, mais la véritable récompense ce sont les bienfaits de la marche sur le corps et l’esprit.

Comment vous financez-vous ?

Au début, grâce aux amis et à la famille. Très rapidement, nous avons commencé à gagner de l’argent. Au bout d’un an et demi nous entamions une levée de fonds mais, comme nous avons atteint la rentabilité pendant les road-shows, nous avons décidé de l’arrêter. Ce qui ne nous a pas empêchés de faire entrer deux fonds : Kima Ventures et Level-up, qui nous ont notamment aidés sur la gamification. Nous avons la chance d’être indépendants et de pouvoir autofinancer notre implantation aux États-Unis. Si celle-ci fonctionne, peut-être que nous accélérerons avec une levée de fonds. 

Vous développez une nouvelle offre à destination des entreprises. Comment fonctionnera-t-elle ?

Nous avons commencé par mettre en place chez WeWard une indemnité kilométrique marche. Nos collaborateurs touchent chaque mois 5 euros s’ils marchent en moyenne 6 000 pas par jour, 10 euros pour 10000 pas et 15 euros pour 15000 pas. Nous voulons fournir aux entreprises un environnement qui fait marcher davantage les salariés. Il y aura par exemple des challenges par équipes, avec une partie du gain reversée aux gagnants et une autre partie à une association. Nous visons les entreprises de toute taille.

Propos recueillis par Olivia Vignaud